vanité vanité...

Publié le par Letrèfle

Un jour, j’ai rompu une amitié avec une ex.

On n’était pas vraiment amis et je ne saurais dire si je pouvais vraiment la taxer d’avoir été une ex. On avait été amants sans que les sentiments soient d’une passion déraisonnée. Et moi, sans passion…je ne vis pas…


Elle n’avait pas aimé ma franchise à lui dire d’arrêter de se mater le nombril. Et je m’y connais, moi en matière de matage de cette partie du corps que je découpe quotidiennement en tranches si fines…

Et me voilà en réunion, nez à nez avec elle quelques jours après notre échange de mails houleux, qui a vu ma condamnation à disparaitre de ses potes sur fcb… C’est qu’elle y va, elle, quand il s’agit d’exprimer son mécontentement…
Je n’ignorais pas qu’elle serait là. Elle, en revanche ne le savait peut-être pas. Cela me conférait exagérément une aisance de mâle dominant.
Etant en avance, nous sommes seuls en salle de réunion, vide… La situation me semble cocasse. Sur un ton amusé et léger, je ricane presque un « ça va ? » tout en regardant distraitement mes papiers.
Sa réponse fuse en forme de scud thermonucléaire… « Inutile d’être hypocrite avec moi, ni de sourire. Je n’ai pas aimé ton mail et je n’engagerai pas de conversation avec toi… » Nous sommes interrompus par l’arrivée des autres acteurs de cette réunion passionnante, et où je ne m’attends guère à ce qu’on favorise la reproduction de mouches hétérosexuelles.

Parmi eux, un spécialiste de la boite qui joue un tour de force remarquable en début de séance… Un de nos big boss s’adresse à lui… « Bien…(les boss commencent souvent ainsi l’entrée en matière pour prendre le dessus sur les participants de ce type de briefing…) monsieur, vous allez nous expliquer l’importance psychologique de l’enjeu de cette réunion…
_ Tout à fait, réplique notre homme à la spécialité encore non dévoilée,
en préambule, je voudrais souligner l’excellent travail réalisé par l’équipe de psychologues. Je vous le dis en connaissance de cause, étant moi-même psychologue clinicien et ayant donc appris à décrypter, par exemple, vos comportements et postures autour de cette table… »

Il lâche cette information très vite et passe dessus comme si c’était un détail avec l’aisance du beau brun en blouse blanche, le regard filtrant... L’atmosphère se (dé)tend et l’attention se concentre sur le psychologue dont je découvre la spécialité… J’ai croisé les bras depuis 3 mn… Je souris…
Trop fort… Surtout ne pas bouger….Tout le monde a changé de position pour essayer d’en prendre une plus cool, détendue, avenante. Cet homme a décrispé l’ambiance sur un argument borgésien invérifiable et quand bien même il a vraiment été formé à cela … ! A-t-il été vraiment attentif aux positions de chacun autour de la table ?
Certains délient négligemment leurs mains en soupirant doucement. Notre homme peut parler avec une certaine légitimité uniquement au culot de cette phrase… Il prend l’avenant sur le boss dont le visage reste difficilement impavide. C’est un truc qu’il a déjà fait ? A voir… Mais, ça marche…
Sa voisine, mon ex, est en face de moi. Elle ne s’est pas laissé prendre au jeu du psy. Elle en a même rit doucement, en se rapprochant de lui. Elle le connaît déjà et ils ont apparemment réalisé au moins une mission ensemble. Elle est la seule femme dans la réunion.

 

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Une heure plus tard, c'est à son tour de générer aussi son effet quand elle enlève sa veste laissant négligemment (mouais...) deviner par le léger bâillement de sa robe un soutien gorge en petite dentelle blanche. Le testostéromètre s’est brutalement affolé. Deux minutes après ce réchauffement climatique, le big boss se lève et ouvre une fenêtre. Son regard aimanté le trahit et elle sait qu’elle peut en jouer, d’autant qu’elle et le boss ne sont pas forcément tout le temps sur la  même longueur d’ondes… Le problème des femmes dans cette boite, ce sont les hommes….

Un soutien gorge évocateur et voilà…

Nos hormones libidineuses nous rappellent à l’ordre, satisfaisant le rez de chaussée de la pyramide de Maslow…. Le soutien gorge, celui qui au moyen âge, contient les forts, soutient les faibles et ramènes les égarés… Je souris de nouveau… Je la regarde dans les yeux, surtout pas ailleurs. Elle est en face de moi ; elle lève les yeux, soutient mon regard aussi froid que le mien cherche à rester impassible.

 


Tu crois vraiment que tu vas m’avoir avec un décolleté alors que je me rappelle encore ce qu’il y a dessous ? Alors que je sais pourquoi nous sommes en froid ? Alors que je t’ai écrit encore et encore que tu pourrais toujours compter sur mon amitié sincère et fidèle ? Alors que je t’ai dit que malgré ta réaction, je continuerai de te blâmer en secret mais de te défendre en public envers et contre le premier tocard qui s’est pris un râteau ? Alors que je serai ton avocat contre toute femme jalouse qui véhémente sur l’utilisation de tes atouts féminins qu’elle aurait aimé sans doute avoir pour peut-être finalement agir de même ?
Clairement, le problème des femmes au boulot ce sont les hommes, ceux qui confondent séduire et abuser…ceux qui se laissent abuser par cette pseudo naïveté, cette fausse candeur machiavélique, cette ingénuité calculée, cette insidieuse jeunesse…Tout le secret de ces relations au travail est dans l’abus… la « border line » à ne pas franchir (si vous ne glissez pas un mot anglais dans votre article, vous êtes has been). Car il n’existe aucune relation véritablement asexuée dans le boulot, surtout dans le milieu macho par essence dans lequel j’évolue depuis quelques années.
La réunion se termine enfin. Le big boss a satisfait son égo en faisant un cours et une explication épidermique à la moindre remarque ou intervention. Il est brillant mais vaniteux. A trop en faire, il perd en légitimité, la réunion aurait pu ne durer qu’une heure et ainsi nous éviter au moins le déclenchement d’une tempête de testostérone dans la pièce déjà chauffée par le projecteur. Ils ont encore tous quelque chose à se dire. J’aurais eu des tas de choses à dire. Mais je n’ai pas envie d’être glacé par le regard de mon ex avec sa tête dodelinant et ses lèvres se pinçant en me considérant, le tout posé sur son buste radio-actif. Je lance un ironique « au revoir, madame » auquel elle répond par un « salut » et sa poignée de main ferme, me rappelant accessoirement son activité sportive majeure de championne en arts martiaux en contradiction parfaite avec sa taille moyenne et menue, ses minces jambes élancées, ses mains douces et sensuelles…

Je m’échappe en essayant de ne pas me perdre dans le dédalle des couloirs de cette partie de la boite où je vais rarement car elle est hautement sécurisée.
Sur le chemin du retour, je rentre avec le psychologue. Un sentiment diffus me crispe soudain.
J’ai déjà vu cet homme ? Sa complicité avec catwoman à la poitrine himalayenne tropicale me tarabuste ? Il a couché avec elle aussi ? Elle a couché avec lui aussi?
Mon cœur s’emballe d’un coup…
« Vous n’aviez pas une barbe avant, monsieur ?
_Non, mais une moustache », répond mon homme d’un sourire bienveillant…
Je percute froidement la planète, oubliant mes conjectures de mâle dominant.
« On s’est déjà croisé, n’est-ce pas ?
_Oui... je vous ai eu comme patient il y a quelques années… Comment allez-vous ? Vos soucis de santé sont résolus ? »
Il se rappelle parfaitement de moi, tel Robocop en blouse blanche et ses fiches à jour. Il n’était peut-être pas capable de décrypter les personnalités des gens autour de la table mais la mienne, il la connaissait parfaitement bien… J’avais été en réunion avec une ex et ex amie, et un ex psy et leur complicité m’avait semblé douteuse… J’écourte la conversation par des réponses en balbutiements de vie courante. Finie la maitrise de soi orgueilleuse. Je revois la scène où je reste fièrement les bras croisés…. Je chasse tout ça.


Il faut faire le compte rendu écrit de cette réunion ailleurs que sur mon blog, même si les mouches dans la salle en ont encore pris un coup derrière les ailes…

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